18 mars 2021 - 20 février 2022
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Consultante invitée : Nak Alariaq
La Guilde est fière de présenter, en partenariat avec l’Inuit Futures in Arts Leadership: The Pilimmaksarniq / Pijariuqsarniq Project, l’exposition Pudlo Pudlat : Au-delà des limites.
Pudlo Pudlat (1916-1992), chasseur et artiste Inuk, naît au camp d'Admadjuak et s'installe à Kinngait (Cape Dorset, Nunavut) dans les années 1950. L'histoire de Pudlat et de La Guilde remonte aux années 1950, lorsque La Guilde engage un officier et artiste itinérant, Saumik (James Archibald Houston), afin de parcourir l'Arctique et de se rendre dans les communautés Inuit. L'objectif de Saumik est d’envisager la viabilité d’une économie artistique et le type d'art et d'artisanat qui pourraient y être réalisés. En plus de Pudlat, Saumik encourage d'autres Inuit à dessiner, tel Kenojuak Ashevak. La première génération d'artistes de Kinngait est établie en 1959 à travers la formation des Studios Kinngait (auparavant connus sous le nom de West Baffin Eskimo Co-operative), qui est possible grâce à l'aide de Saumik, de Pudlat, d’Ashevak et d'un groupe de maîtres graveurs entraînés et qualifiés, comprenant Iyola Kingwatsiak, Kananginak Pootoogook, Eegyludluk Pootoogook et Lukta Qiatsuk. Depuis 1959, le groupe des Kinngarmiut (résidents de Kinngait) publie chaque automne une collection annuelle de gravures basées sur les dessins de Pudlat. Il s'agit de la plus ancienne coopérative artistique du Canada, toujours en activité aujourd'hui.
Pudlat constitue le premier Inuk dont le Musée des beaux-arts du Canada a présenté une exposition solo en 1990. Il est l'un des artistes graphistes les plus reconnus de Kinngait. Il n'a pas reçu de formation professionnelle en tant qu’artiste et sculpteur. Il survit grâce à la chasse et à la pêche le long de Qikiqtaaluk (la région de Baffin) jusqu'à la fin de sa quarantaine, quand Saumik l'encourage à dessiner. Pudlat est éloquent et ouvert dans sa façon de s’exprimer, de parler de sa vie, de sa famille, de sa carrière de dessinateur, de sa vie dans des camps d'avant-postes et de son établissement à Kinngait, où il demeure, tout en continuant à parcourir le monde pour partager son art et sa vision.
« Quand je veux dessiner, il me semble que le crayon que je tiens possède sa propre volonté. Même si ma main le tient, le crayon semble se mouvoir de lui-même. » (Pudlo Pudlat, Inuktitut Magazine 1991:45-46)
L'exposition semi-permanente est une collaboration entre l'équipe de La Guilde et la consultante Nak Alariaq pour montrer l'incroyable héritage laissé par Pudlat. L'exposition comprend quelques textes présentant l'artiste et certains aspects de son travail (la collaboration, les technologies, voyager et les animaux).
Pudlo Pudlat : Au-delà des limites ne traite pas seulement des contributions de Pudlo Pudlat dans le développement de l'art Inuit, mais aussi de sa vie d’homme Inuk qui change radicalement en cours de route — passant de la chasse aux arts visuels. L'œuvre de Pudlat est un compte-rendu intime et de première main de ses voyages à travers le monde. Pudlat a eu une relation unique avec le monde de l'art puisqu'il était un artiste Inuk et qu’il a participé aux vernissages de ses expositions. Nous voulions que son point de vue soit au cœur de cette exposition. Au-delà des limites reconnaît le rôle de Pudlat dans la diffusion de l'art Inuit, dans la nouveauté des sujets qu’il aborde et dans sa façon de repousser les limites.
TEXTE DE L'EXPOSITION
PUDLO PUDLAT: AU-DELÀ DES LIMITES
Par Nak Alariaq
1. UNTITLED, 1989 (SCULPTURE DE CARIBOU)
Dans les années 1950, lorsque Saumik demande aux Kinngarmiut (habitants de Kinngait) de dessiner et de sculpter la pierre afin de vendre leurs œuvres dans les marchés du sud, Pudlo Pudlat veut devenir sculpteur. Malheureusement, à la fin des années 1950, Pudlat se blesse à la main, ce qui engendre son hospitalisation ...dans un sanatorium du sud. Il part pendant près de six mois pour recevoir le traitement approprié, mais sa main ne sera plus jamais la même. Étant donné l'état de la main de Pudlat et les risques élevés de blessures que comporte la sculpture sur pierre, Saumik l’encourage à dessiner.
Il n'existe qu'une poignée de sculptures créées par Pudlo Pudlat. Pudlat est connu pour son amour de la chasse au caribou. Il tente de rendre sa sculpture d’un caribou assis aussi réaliste que possible. Dans son travail, il apprécie le réalisme et exprime que, dans le dessin et la sculpture, le plus difficile est de transmettre une émotion.
2. COLLABORATION
Dans les années 1970, Kate Graham visite Kinngait et enseigne à Pudlo Pudlat et à plusieurs autres Inuit l’utilisation de la peinture acrylique et de l’aquarelle dans le cadre d'un atelier de peinture collaboratif. Une fois l'atelier de peinture terminé, Graham laisse à la disposition des artistes du matériel afin qu’ils puissent l’utiliser. Pudlat préfère employer une peinture bleue pour réaliser le fond de ses paysages, qu'il termine en dessinant par-dessus le lavis. Il expérimente également avec d'autres couleurs, tel le rose, couleur qui reflète l'ambiance et l'atmosphère vive d'un coucher de soleil arctique à la fin juin ou au début juillet.
3. LES TECHNOLOGIES
Pudlo Pudlat n'hésite pas à intégrer au paysage traditionnel de Qikiqtaaluk de grands bateaux le long de la côte et des avions parsemant le ciel. Dans une entrevue accordée à Inuktitut Magazine, Pudlat déclare qu'il est conscient d'être l'un des seuls artistes de Kinngait de sa génération à incorporer les technologies modernes dans son travail. Il explique qu'il les a incluses intentionnellement et que certaines d’entre elles possèdent un sens particulier, alors que d'autres font partie de l'œuvre pour des raisons esthétiques ou créatives. Puis, il précise que les technologies ont amélioré certains aspects de la vie dans l'Arctique. L'usage d’avions et d’hélicoptères augmente la sûreté et la fiabilité du sauvetage de chasseurs et de marins échoués plus que jamais auparavant. Depuis les années 1990, d'autres artistes, tels qu'Itee Pootoogook et Tim Pitseolak, ont réalisé des dessins plus grands que nature de machines lourdes et de paysages modernes de Kinngait.
4. VOYAGER
Voyager consiste peut-être en l'une des activités préférées de Pudlo Pudlat. Au cours de son enfance et de sa jeune vie d’adulte, les voyages saisonniers entre les camps sont courants. Le changement de saison entraîne la transformation des paysages, ainsi que le déplacement annuel vers les camps d'été, de pêche au printemps et d'hiver. Les paysages de Pudlat montrent le passage des saisons grâce à l'inclusion des eaux bleues, des brunes montagnes rocheuses d'été et des équipements, tels les bateaux, les voitures ou les avions. À la fin des années 1950, Pudlat se rend dans le sud pour la première fois afin de recevoir des soins pour la blessure de sa main. Compte tenu des circonstances, Pudlat considère ce voyage comme une aventure. À l'époque, il ne sait pas qu'il deviendra l'un des artistes graphistes Inuit les plus influents du 20e siècle. Après avoir été propulsé au-devant de la scène artistique dans les années 1970, Pudlat voyage à travers le Canada, les États-Unis et l'Europe pour faire l'ouverture d’expositions et partager son point de vue sur l'art et la culture Inuit.
5. ANIMAUX
Pudlo Pudlat s'est intéressé à la représentation des animaux, qu’il explore dans ses dessins et ses sculptures. Ainsi, dans la collection de La Guilde, un grand nombre de gravures et de dessins de Pudlo Pudlat comprennent des oiseaux et des bœufs musqués. Pudlat aborde de façon très similaire le dessin des yeux des hommes, des oiseaux et des animaux. Les becs pointus et les longs cous des oiseaux, qu’il dessine, se ressemblent également (voir Loons Protecting Young, 1984). Le bœuf musqué hirsute et brun foncé (Young Girl and Muskox, 1983) constitue un autre thème que Pudlat dessine souvent, malgré l’absence de cet animal dans l'écologie de Kinngait. Pudlat l’a peut-être vu à la télévision ou lors de ses déplacements pour parler de son travail et de sa vie. L'omble chevalier (The Fish takes Flight, 1983) - un poisson d'eau froide commun, semblable au saumon par son goût et son apparence - revient également assez souvent dans les œuvres de Pudlat.
6. IN CELEBRATION, 1979
En 1949, la Canadian Handicrafts Guild, aujourd'hui appelée La Guilde, organise la toute première exposition d'art Inuit contemporain à partir d'un petit groupe de sculptures collectées par Saumik lors de sa première expédition. La Guilde commande la lithographie de Pudlo Pudlat, In Celebration, pour l'exposition de 1979 (du même titre), qui commémore la première exposition de 1949.
L'exposition est organisée en réponse à un article de 1977 qui déclare sans équivoque que l'art Inuit est mort et que « l'acheteur doit se méfier » des œuvres les plus récentes. Le mot circule rapidement et le milieu, ébranlé, fait face à une remise en question, ce qui a des répercussions sur les ventes et le message entourant les œuvres. Les rumeurs peuvent dangereusement brouiller les perceptions. L'exposition In Celebration doit faire plus qu'honorer un événement passé. Elle doit réfuter visuellement le « destin tragique des experts d’un art mourant ». La directrice de La Guilde, Virginia J. Watt, organise cette exposition, qui met en relation les artistes établis et les artistes de la relève- un concept toujours au cœur de la mission de La Guilde. Dans une lettre adressée à Inuit Arts and Crafts à propos de l'exposition, elle définit l'art comme « [...] une expérience de partage entre l'artiste et le spectateur. Il s'agit d'un échange d’émotions, de souvenirs, d’images et d’idées entre les artistes et les spectateurs. C'est une expression personnelle et dynamique de l'être humain ». Dorset Fine Arts désigne d'abord la lithographie sous le nom de Summer Sky, jusqu'à ce que Watt suggère de l’intituler In Celebration, tout comme l’exposition, afin qu’elle en porte l’essence. Pour Watt, cette œuvre représente mieux que n’importe quelle expression ses sentiments envers l'exposition – l’imposant bœuf musqué s’élance vers l’avenir, regarde vers ce que la directrice perçoit comme étant les possibilités infinies de l’art Inuit.
CONTENU VIRTUEL
Une courte video du montage de l'exposition, Geneviève Duval, responsable de la programmation et des communications, et Marie-Hélène Naud, coordinatrice aux activités culturelles et assistante de la galerie, ainsi qu’un aperçu de l'espace :
L’artiste Napatsi Folger vous présente une conférence sur la bande dessinée et sur les multiples possibilités qu’offre la juxtaposition du texte et de l’image. Pour tous ceux et celles qui n’ont pas pu se joindre à nous, voici la vidéo de la conférence :
PHOTOS : Vues d'exposition, 2021. © La Guilde
IMAGE : Assemblage d'œuvres de Pudlo Pudlat : Au-delà des limites, 2021. © La Guilde
VIDÉOS : Preview | Pudlo Pudlat: Above the Limits, 2021 ; Artist Talk: Discovering Comics | NAPATSI FOLGER, 2021. © La Guilde